Le bol à l’envers
- Audrey TOUBOUL
- 16 juin
- 2 min de lecture
L’arbre qui cache la forêt
On croit souvent qu’un geste, une réaction, un mot de trop, c’est “juste ça”.
Mais parfois, ce qui semble anodin est en réalité un signal.
Un arbre, qui cache une forêt entière.
Ici, j’essaie de ne plus m’arrêter à l’arbre.

Ce matin-là, j’étais déjà un peu tendue.
Mais rien de dramatique.
La journée commençait normalement. Les gestes s’enchaînaient. Je remplissais le lave-vaisselle.
Et là, je vois le bol.
À l’envers. Posé n’importe comment. Comme si la gravité n’avait plus d’effet, ni les règles tacites de l’organisation domestique.
Et j’ai crié. Pas un hurlement. Mais cette voix-là, un peu trop forte, un peu trop sèche.
“Mais ce n’est pas compliqué de le mettre dans le bon sens !”
Bien sûr que ce n’était pas le bol.
C’était l’arbre.
Ce bol à l’envers était simplement ce qu’on voyait.
Mais derrière lui, il y avait une forêt : celle de mon histoire, de mes charges, de mes mémoires.
Pas à décortiquer sur le moment. Juste à reconnaître.
Et à traverser.
Le plus terrible, ce n’est pas d’avoir crié.
C’est qu’on pourrait dire que je suis comme ça.
Nerveuse. À cran
Il y a quelque chose de l’ordre du déterminisme là dedans.
Et que ce moment-là devienne une case dans laquelle on me range.
Alors que moi, je sais.
Je sais que c’était un signal.
Un petit frottement de la vie pour me dire : « Stop. Tu tires trop. Tu as besoin d’être vue, toi aussi. »
Alors j’ai rangé le bol.
Et j’ai respiré.
Et j’ai dit pardon, pas seulement à l’autre, mais à moi aussi.
Parce que je ne suis pas le cri.
Je suis ce qu’il y avait derrière.
Et je suis aussi celle qui, aujourd’hui, a choisi de regarder la forêt.



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